L’Assistance Utilisateurs : L’ASP peut mieux faire !…
2 Déc, 2020

Le quotidien de l’Assistance Utilisateurs ASP – SECTEUR EMPLOI

L’ASP est en première ligne chaque jour pour donner des réponses claires, réactives et efficaces sur le déroulement des démarches vécues par l’usager bénéficiaire ou employeur, comme des démarches fastidieuses, compliquées et perçues plus comme alourdies que simplifiées.

Les gestionnaires AU ne sont plus en mesure, à l’heure actuelle, de mener à bien leur mission. Le relationnel de courtoisie et le sourire au téléphone, laissent place au stress, à l’inquiétude de ne pas savoir répondre. Les capacités d’adaptation et de réactivité deviennent de plus en plus difficiles face aux situations multiples, différentes en niveau d’intervention, avec des dispositifs de plus en plus complexes, avec des mises en place rapides, dans des contextes difficiles comme les fermetures d’entreprises, des situations d’endettement, des burns out, des menaces de suicides…

Rassurer les personnes et adopter un discours positif dans ce contexte est presque inapproprié face à la détresse côté usagers et face à des conditions de travail dégradées côté gestionnaires AU. La mise en place de la relation usager via le déploiement d’outils (SYLAé, portail ACTPART …) et via des numéros d’assistance utilisateurs qui répond au souhait de l’Agence de palier aux questionnements des appelants sur le réglementaire, le technique et les procédures d’acheminement des dossiers depuis leur constitution jusqu’à leur mise en paiement contient, à l’heure actuelle, beaucoup de trous dans la raquette.

La mission des gestionnaires dans l’accueil et le diagnostic pour renseigner et orienter un bénéficiaire d’aide de l’Etat dans le cadre d’un service public de qualité se fragilise de jour en jour. La théorie nous décrit la satisfaction des gestionnaires d’avoir résolu les problématiques de leurs interlocuteurs, mais, malgré le dévouement et l’envie de donner la solution qui subsistent, malgré la rigueur et le professionnalisme de toujours, il devient de plus en plus difficile de cocher les cases depuis ces derniers mois, avec l’explosion des AU, des dispositifs et de tout qui les accompagne.

Les points de vigilance notés par SNUITAM-FSU via les remontées terrain

Les formations ont été dispensées sur ce domaine d’activité, sur les fondamentaux de l’accueil « clients » et la gestion des appels difficiles. En revanche, la communication et l’information sur les dispositifs gérés et les spécialisations données aux sites référents et gestionnaires de ces dispositifs sont à revoir ou/et améliorer. Le relationnel d’équipe s’évapore peu à peu, et ce, en dehors du contexte covid et du travail à distance, et en dehors du télétravail. Les réunions sont devenues des options, même les plus courts débriefs, par manque de temps ou d’informations en amont.

On recule systématiquement le don d’informations car leur teneur est fébrile, incertaine ou inexistante. Le Gouvernement s’est engagé à vouloir donner le change face à la crise, pour rassurer, calmer les patrons des TPE, PME et même les grandes entreprises qui sont mises à mal. Et l’ASP, en tant qu’organisme payeur, a été jetée en pâture aux publics.

On navigue à vue avec des outils non finalisés ou avec des blocages de paiements comme sur l’ACTPART, des prises en compte de flux tardifs comme pour les contrats de professionnalisation. Les employeurs pensaient avoir des avances de trésorerie, et que les premiers paiements arriveraient très rapidement… Il n’en est rien et ils sont donc énervés, ils se sentent baladés, arnaqués, mal traités (comme ils le disent si bien et ça on l’entend tous les jours « pris pour des Cons » ). Et pourtant quelle satisfaction, quand on raccroche et que l’interlocuteur dit « merci pour vos réponses tout est très clair je vous souhaite une excellente journée… Cela est Top.. ça arrive parfois, mais plus aussi souvent qu’on le voudrait.

Le fait de synchroniser les outils, lorsque l’usager se connecte avec les codes identifiant/mot de passe et bien ça plante de l’autre côté et inversement. Les mails pour se connecter dans SYLAé arrivent bien tôt au domicile de l’entreprise, les dossiers ne sont pas remontés dans SYLAé ni les codes d’inscription reçus, les employeurs perdent un temps fou à essayer de bidouiller dans leur SYLAé auquel ils n’ont pas d’accès. Cela génère un nombre conséquent d’appels.

Des paiements sur comptes soldés car souvent s’ils ont un compte SYLaé et que le RIB a changé entre les périodes prises en charge par l’ASP, ils ne vérifient pas et laissent le RIB déjà connu. L’autre souci rencontré ce sont les invalidations suite réimputations non validées dans NOE donc les reversements ne se font pas… Il ne suffit pas de changer le RIB dans SYLAé il faut aussi traiter l’invalidation. Ce sont quelques exemples basiques de dysfonctionnement qui pourraient être réglés et moins générer d’appels.

Le travail des partenaires en amont a un impact majeur sur l’image de l’ASP. Quand tout va bien et que les paiements se font il n’y a rien à redire mais en revanche, lorsque les retards, les erreurs se multiplient en amont de l’Agence, dans les dossiers/flux transmis à l’ASP, celle-ci est tenue responsable du retard de paiement ou du non-paiement. Les usagers/employeurs/bénéficiaires deviennent impatients, désagréables, certains agressifs, et critiques sur l’Agence et le service public en général. Un gros travail de communication sur le circuit des demandes d’aides de l’Etat doit être fait auprès des partenaires externes, avec un gros point faible sur l’alternance.

Augmentation des files d’attente d’appels du fait des délais d’attente plus longs dont se plaignent les usagers (15 à 20 minutes), ce qui est normal car les questionnements sont nombreux, plus complexes et demandent des échanges plus longs. Les gestionnaires AU prennent plus de temps pour répondre, soit parce que des questions diverses sur plusieurs aspects d’un dispositif ou plusieurs dispositifs, soit par manque de savoir et donc doivent rechercher dans leurs notes, mails, scripts… L’information est trop disparate et ne permet pas d’être réactif face à la spontanéité des questions.

De plus, les gestionnaires ne peuvent transférer en milieu de conversation vers un autre service du fait déjà d’une longue attente pour nous avoir au téléphone. Cela n’est possible qu’en début de prise d’un appel mal distribué. Les transferts d’un secteur à l’autre de l’AU sont mal perçus car l’interlocuteur préfèrerait terminer la conversation avec l’agent avec qui il l’a commencé. Balloté entre choix 1 choix 2 entre numéros AEJ, alternance, NUE général, l’interlocuteur râle et perd du temps qu’il ne consacre pas à son personnel et son entreprise.

Le traitement des mails dans les BAL génériques des domaines d’activité AU devient un réel problème. On y trouve de tout et le nombre est trop énorme (2000 à 3000) pour être traité dans des délais raisonnables. Les usagers renouvellent leurs demandes donc c’est « le chat qui se mord la queue ».

MyASP sera utile mais à condition que le partage dans cet espace collaboratif soit cadré sur un « bien savoir » et un « bien transmettre ». La transmission de l’information reste bâclée dans le transfert de mails, de script dans le sens descendant, sans explication de vive voix. C’est un peu l’aventure de chacune chacun de comprendre et d’appliquer mais avec un risque d’interprétation qui est inévitable.

Une formation plus spécifique à TRUE CONF est indispensable pour une bonne utilisation et une veille à ce que l’outil fonctionne bien avant utilisation est nécessaire pour éviter des problèmes de micros, de caméras…

Les propositions d’amélioration 

Dans un souci de collaboration, de transparence et de dialogue social, SNUITAM-FSU fait des propositions à la direction avec un recul de terrain afin de prendre en compte quelques humbles et objectives suggestions, dans un soucis, non de critiques pour critiquer, mais de vraiment faire avancer les choses dans ce nouveau métier difficile et oublié face aux impératifs chiffrés. Il en va de l’amélioration des conditions de travail sur l’aspect RPS plus que matériel car l’ASP a fait d’énormes efforts sur ce point et SNUITAM-FSU l’en remercie. Il faut encore redoubler d’efforts pour la prise en compte des dysfonctionnements de terrain, pas si terribles au fond, mais qui pourrissent le quotidien des agents gestionnaires AU en première ligne tous les jours face à notre public. L’effet boomerang risque de se faire voir à court ou moyen terme. Il en va de l’image de notre établissement si apprécié jusqu’alors par les ministères de tutelle et les donneurs d’ordre.

Voici ces propositions :

  • Plus de positions AU nationales et plus de positions de secours pour pallier aux prises d’appels plus longues car plus chargées en questions et en complexité
  • Revoir la répartition et les process des BAL génériques en attribuant un temps égal entre APPELS/MAILS et en spécialisant les rédacteurs (SYLAé, NUE, infos générales alternance, traitement DSN, etc….) et utiliser les ressources expérimentées dans les domaines à traiter pour plus d’efficience.
  • Il est urgent et nécessaire de revoir :
  • la circulation de l’information interne et externe en amont,
  • la circulation de l’information en aval avec la tenue de réunions courtes, synthétiques mais de façon hebdomadaire, pour un partage des difficultés, la mise en commun de connaissances, de compétences à tout niveau,
  • la reformulation des mails/courriers envoyés aux employeurs qui les trouvent peu clairs et explicites.
  • Il serait utile de renouveler certaines formations sur le terrain :
  • sur les outils (SYLAé, ACTPART…)
  • sur les nouveaux process (DSN)
  • Les besoins en formation se font sentir au quotidien par le fait des rappels effectués par les usagers en retraçant l’historique des appels. Des lacunes se sont installées par manque d’accompagnement sur le terrain.
  • Besoin d’accompagnement des agents et du soutien hiérarchique dans ces moments de tension extrême
  • La remontée « terrain » serait à prendre en compte car souvent ignorée du fait qu’elle émane d’agents sans galons donc la prise en compte de leur avis reste dans le tiroir. Et pourtant quoi de plus concret que l’expérience du quotidien sur les positions téléphoniques pour connaître la réalité des difficultés que rencontrent à la fois les usagers mais aussi les agents. Les points de difficultés ou de blocage sont donnés pour être abordés en comité suivi AU mais sont-ils transmis ? Sont-ils entendus ? Et la restitution est-elle faite aux équipes ? Rien n’est bien sûr…
  • Les EDL manquent sur les nouveaux dispositifs et les retards. L’agent ne sait pas toujours pourquoi le déploiement de tel ou tel dispositif a pris du retard ou n’est pas finalisé. Il s’en trouve dépourvu d’explications parfois avec un sentiment de désinformation ou rétention d’information.
  • Elargissement des comités de suivis AU en y donnant accès aux agents qui connaissent le terrain
  • Veille sur la montée en compétences et au maintien de celles-ci (écoutes téléphoniques programmées à la demande de la hiérarchie et accord de l’agent ou à la demande expresse de l’agent, accompagnement, coaching…)
  • Prendre en charge le prestataire externe (MAJOREL) en raison de la complexité des demandes et de l’évolution rapide des technicités
  • Développer des outils pédagogiques ludiques, concis, précis, pour faciliter l’accroche et la compréhension des outils et dispositifs. La participation des gestionnaires du terrain pourrait y être efficace.
  • Développer de la documentation et des supports de présentation des dispositifs pour élargir la connaissance de l’environnement propre à chaque nouvelle mesure gouvernementale
  • Développer des guides méthodologiques comme des EDL adaptés, plus concis et ciblés aux situations et contextes
  • Développer des supports de communication externes pour les usagers employeurs, experts comptables… Valoriser l’image et le rôle de l’ASP dans les étapes du déploiement de nouveaux dispositifs
  • Prise en charge urgente des mails dans des BAL spécialisées et traitées à part égale avec les prises d’appels
  • Assurer la maîtrise des outils métiers par de la formation, de l’information et de l’accompagnement « terrain » au quotidien
  • Eviter les délais d’attente trop importants en invitant l’appelant à renouveler son appel lorsque l’attente est supérieure à 5 minutes. Au-delà de 3 tentatives d’appels supérieurs à 5 minutes, l’appel est ainsi considéré comme non abouti. Il est important de préciser que le temps d’attente est gratuit avec le nouveau numéro unique à venir. Les callbacks n’aboutissent que rarement. Et génèrent des soucis de blocage sur outils KIAMO qui alourdissent l’enchaînement des appels. Adopter peut-être un service de message vocal pour plus d’humanisation des individus dont les appels ne peuvent aboutir. Prévoir des positions de rappels comme des positions mails.
  • Prise en compte de l’AU en profil métier avec modification des fiches de poste

L’impact de la qualité de l’accueil sur la personne 

L’atmosphère est tendue sur les AU. Côté Usager on y a remplacé le « prenez un ticket » des files d’attente aux guichets par un vocal qui dit combien le temps d’attente va durer. Du côté de l’agent le « Je suis désolée pour le retard mais je suis seule aujourd’hui » par un « je suis désolée mais je ne connais pas bien la procédure exacte…. ». Les procédures changent mais les problèmes subsistent. Quelle que soit la précision de l’instruction des dossiers ou la qualité des renseignements donnés, une impression, une image ne se forment pas uniquement sur la dimension technique des services. Bien au contraire, elles sont conditionnées par l’ensemble des comportements susceptibles de générer chez chacun le sentiment d’être pris en compte en tant qu’individu à part entière. Loin de n’être constituées que d’éléments rationnels, nos relations sont d’abord faites d’échanges émotionnels.

Pourtant, lorsqu’il s’agit d’améliorer la qualité de l’accueil, c’est bien souvent uniquement sur sa dimension technique que l’accent est mis. On reste dans une culture de résultat où la quantité de décrochages d’appels compte bien plus que la qualité des réponses faites. Plus les agents font des efforts de prise en compte d’autrui, plus ils génèrent un sentiment de reconnaissance chez les usagers et permettent que ceux-ci aient une image positive de l’établissement. Ne pas faire ces efforts renforce l’image de distance de l’administration et fait potentiellement naître de l’agressivité de la part de l’extérieur ASP et un ressenti négatif sur le travail accompli en interne ASP.

Il s’agirait donc d’accompagner les agents à prendre conscience que leur rôle est important, pas mis de côté dans ce contexte contraint de crise. Que leur rôle est de savoir s’adapter à toutes les demandes et toutes les situations. Ceci ne signifie pas dire « oui à tout ». Bien au contraire, il s’agirait aussi de « savoir dire non » de manière toujours entendable et satisfaisante, conscients que derrière toute demande il y a des motivations, des émotions et que c’est d’abord la reconnaissance de celles-ci qui conditionne la qualité de la relation. Il s’agirait donc finalement de considérer que la prise en compte de la dimension humaine de la relation prévaut sur la dimension technique ou quantitative et doit faire partie des compétences fondamentales de tout agent.

Le niveau d’informations délivrées par téléphone reste parfois succinct mais c’est la qualité du service qui est le plus souvent appréciée par l’usager selon le temps d’attente avant de pouvoir obtenir un interlocuteur, le type de réponse et sa personnalisation même s’il s’agit de ne délivrer de solutions immédiates mais d’accompagner et d’informer pour effectuer les démarches préalables pour obtenir un paiement.

Conclusion

L’accueil téléphonique doit être réalisé par des agents disposant du niveau de connaissances nécessaires à l’apport de réponses adaptées. Ils doivent bénéficier d’un appui spécifique par des scripts pas à pas clairs et concis qui permettent la malléabilité des propos en fonction des questions tout en respectant la trame générale du script, par de l’appui pédagogique au quotidien.

La connaissance « terrain » est primordiale pour gérer les prises d’appels et pour superviser les équipes téléphoniques et avoir une écoute active des points à améliorer, des situations de mal-être, des remises en question sur la qualité des réponses….

La connaissance des applicatifs est primordiale ainsi que de l’environnement de l’ASP et le degré d’intervention de chaque partenaire. Le cœur « métier » (aspects relationnels, techniques, réglementaires…) car il s’agit bien d’un nouveau métier à l’ASP.

Une collaboration de toutes et tous est nécessaire pour parvenir à des résultats satisfaisants à tout niveau.

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